Au bout du téléphone à l’autre bout du monde
Le libraire étranger voulait rendre féconde
Encore plus leur affaire et proposait un nombre
de revues à revendre au soleil et à l’ombre.
« S’il a pu vendre autant, il doit en prendre encore
Plus d’exemplaires frais lui fourniront de l’or
Et je pourrai moi-même me féliciter
De l’avoir bien aidé à mieux s’émanciper ».
Il expédia donc à Ousmane le preux
Plus d’exemplaires encore afin que grâce à eux
L’homme pût faire fortune et vivre sans façon
Jusqu’au jour où le ciel par un colimaçon
L’attirerait vers lui pour sa dernière fin
Après qu’Ousmane eût certes mangé à sa faim.
Il vendit encore mieux qu’au temps naguère, jadis
Il en atteignit même le jardin des délices
Paris était scié, acclamait Bamako…
Avait du mal à croire aux résultats si hauts
(Car il est bien connu que depuis l’Occident
On regarde l’Afrique d’un air condescendant
Et l’on ne pense pas qu’un continent pareil
Pourrait bien contenir des pros qui font merveille
Aussi bien que chez soi – en Europe s’entend.
La leçon vient toujours du guide bienveillant).
Le libraire revint et cette fois s’assit
Prit le temps de parler, de rire et s’ébahit
De la beauté des lieux, des gens et de leur âme
Qu’il n’avait pas encore remarqués, cet infâme.
Ousmane le reçut en bon ambassadeur.
De sa culture il fit éloge de tout cœur
Il montra le ngoni, fit manger le maffé
Montra les rues, les cours, les tissus, le marché
Emmena même l’hôte jusque dans les falaises
Où vivent les Dogons heureusement à l’aise.
L’Européen ému dit qu’un jour il voudrait
Voir aussi l’Africain en son pays français.
« Mais en attendant donc ce voyage à venir
Achète-moi encore des magazines à lire.
Je suis sûr qu’ils vont plaire à ceux que tu convaincs
Je parie même qu’il t’en manquera demain. »
Il disait vrai sans doute car Ousmane eut tôt fait
De vendre encore bien son papier tout frais
Et se retrouva riche en un temps si record
Qu’il regarda sa femme et lui dit son remord.
« J’en avais pris cinq-cents et par un prompt renfort
J’ai écoulé des mille et des mille et encore
Qu’allons nous faire, ma chère, de tant de bonnes grâces,
Quelle décision prendrais-tu à ma place ? »
(à suivre...)
(à suivre...)
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