« Hier, je suis resté à la vidéothèque un peu plus tard que d'habitude. Il faut dire qu'il n'y avait pas eu beaucoup de clients au cours de la journée, ce qui est plutôt surprenant à cette période du mois. Pour m'occuper, je me suis mis à ranger les films sur les rayons, dans l'espoir que quelqu'un viendrait m'en louer un au dernier moment. Ensuite, je suis restédebout pendant quelques minutes sur le seuil du magasin. Les gens passaient sans s'arrêter. »Un homme rentre chez lui en bus, comprend lors de son trajet qu'il se passe quelque chose d'anormal en ville, et réalise progressivement, qu'un drame est sur le point d'éclater et que, tout père qu'il est, il ne va pas pouvoir protéger les siens. Ainsi commence le roman de Boubacar Boris Diop Murambi, le livre des ossements (reparu récemment chez Zulma).
Je me souviens d'avoir été captivée par ce livre, dès les premières pages, lorsque je l'ai commencé, en l'an 2000. En 1994, je n'avais rien compris à ce qui s'était passé au Rwanda. C'était inaudible. Depuis 1994, ça me faisait mal d'y penser et mon esprit se brouillait sans comprendre rien aux images que j'avais pu voir ou aux informations que j'avais pu entendre. Ce livre a commencé à rendre "audible" cette tragédie. Ces premières pages
– qui fonctionnent comme un aperçu, un fait divers en avant-poste d'un récit autre –
ces premières pages, qui racontent simplement la détresse d'un père, m'ont permis d'oser tenter de comprendre.
En ces jours de commémoration du génocide rwandais, je vous recommande la lecture de ce grand roman, ainsi que de L'Ainé des orphelins, de Tierno Monenembo (Point Seuil), L'ombre d'Imana de Véronique Tadjo (Actes Sud) et Notre-Dame du Nil de Scholastique Mukasonga (Gallimard). N'ayez pas peur de les lire, la fiction sert aussi de médium.
Lu en effet Notre Dame du Nil. Passionnant.
RépondreSupprimerJe vais acheter celui ci. Oui, la fiction rend plus proche, plus accessible la réalité, "aussi pire" soit elle.